LA GAZETTE DE L'A.R.B
Anyvonne Restaurant Bar
 
Polynésie II - La qualité du voyage est elle proportionnelle à l'intensité des émotions?
N°18- Février 2002

Vers minuit, la nuit précédent notre départ d'Amanu, un fort vent d'Est se lève. Comme nous sommes mouillés à l'ouest du lagon et donc au vent du motu, un fort clapot se met rapidement à nous chahuter violemment. Le cul au ras de la plage, le bateau saute comme un cabri en tirant sur sa chaîne qui fait un bruit d'enfer sur les patates de corail.

Cassera? Cassera pas? La tension monte nettement dans le bateau où tout l'équipage est réveillé. Le moteur est mis en marche au ralenti, au cas où... La chaîne ne cassera pas et l'ancre, bien engagée dans les patates de corail, ne dérapera pas. Le bateau sera toujours à flot quand ça se calmera deux heures plus tard, mais que d'adrénaline consommée!...

Mais un malheur ne vient jamais seul: Le lendemain, comme nous devons franchir la passe tôt le matin, au moment de la renverse des courants de marée, il nous faut lever l'ancre au lever du soleil. Depuis le mouillage, pour rallier la passe, la visibilité ne sera pas terrible, mais nous avons vérifié qu'en faisant le tour de deux bouts de branches qui balisent l'extrémité de deux bancs de corail, puis en faisant route directe vers la passe, le chemin est clair et aucune patate ne guette... Tout devrait bien de passer si nous arrondissons correctement l'alignement des deux perches...

Au petit matin donc, aussitôt l'ancre revenue à bord, nous faisons route au moteur à 4 nœuds. Comme prévu, après avoir arrondi la première perche nous visons la seconde. Le capitaine et le second devisent gentiment et se font part réciproquement de leur impression d'être "peut être" un peu près de l'alignement des deux perches! Ils sont bien d'accord tous les deux; mais... Nous approchons pour arrondir la seconde perche, quand DROIT DEVANT un morceau de "quelque chose" qui flotte sur l'eau attire l'attention du skipper.

Qui flotte? Mais non, QUI NE FLOTTE PAS!...QUI EMERGE !... C'est "quelque chose" de CORAIL QUI SORT DE L'EAU!!! Hurlement et plongeon du skipper sur la manette de gaz du moteur: ARRIERE TOUTE! Trop tard... Getaway lui aussi sort de l'eau... Et s'immobilise, engagé jusqu'à mi longueur sur une patate de corail qui déborde l'alignement des deux perches, à 30 centimètres sous la surface... Ambiance...

Marche arrière à fond... Barre à gauche, barre à droite... Gérard, dans l'eau jusqu'à la taille, essaie de soulager l'avant et de guider la manœuvre... 10 minutes d'efforts et ouf! Getaway se dégage. Il ne finira pas ses jours ici! On a encore eu chaud, une fois de plus. Et merci aux constructeurs de bateaux en acier bien costaud.

Le calme revenu, l'adrénaline consommée, le babillage reprend à bord de Getaway:

Elle: Finalement, je ne me suis pas trop inquiétée. En bonne bretonne, je me disais qu'il suffisait d'attendre que la marée remonte suffisamment. Au fait, à quelle heure est la marée haute?

Lui: C'était il y a dix minutes, juste à l'heure où nous nous sommes échoués! Ca va d'ailleurs nous permettre d'être dans la passe au moment de l'étale de courant. De plus, le marnage n'est pas très fort par ici.

Et encore une petite ration d'adrénaline supplémentaire et rétrospective!!!