LA GAZETTE DE L'A.R.B
Anyvonne Restaurant Bar
 
Le Venezuela - Les voyages au Venezuela, Mode d'emploi
N°12 - Juin 2000
Voyages en bus Vénézuéliens
Les bus à longue distance sont largement une spécialité américaine. Nous en avons goûté la variante vénézuélienne et nous souhaitons en consigner ici le mode d'emploi. Enfin, tel que nous l'avons compris à travers quelques expériences, et surtout notre voyage à Mérida.
Le décor:
Au Venezuela, le train n'existe pas. Ceux qui ne voyagent pas en avion le font en bus, comme nous en France en T.G.V. 
Chaque ville d'un peu d'importance possède son "Terminal de Pasajeiros". C'est la gare routière où arrivent et dont repartent tous les bus inter-cités. 
A l'intérieur du terminal (comme ici à Cumana), chaque compagnie ayant une ligne passant par là (enfin, les plus grandes, pas vraiment toutes), dispose d'un petit stand qu'elle ouvre autour des moments de départ et d'arrivée de ses propres bus, pour vendre ses billets. 
Sauf dans les grands terminaux de Caracas (et nous y reviendrons) il n'y a aucune organisation de renseignement centralisée sur les horaires et les destinations. Les stands ci dessus sont les seules sources d'information.Quand ils sont ouverts.
Globalement et quelles que soient les compagnies, il y a deux catégories de bus et de tarifs:
Le service "Standard", avec de vieux bus, souvent poussifs et jamais climatisés. Mais toujours très bien sonorisés.
Le service "Ejecutivo" qui est assuré par de super bus, avec une climatisation d'enfer et dont toutes les fenêtres sont voilées de rideaux opaques pour permettre de voir... le circuit de télé interne.
  
La pratique:
Nous arrivons donc ce 27 décembre 1999 vers 11 heures au terminal de Cumana pour tenter de rejoindre Merida, à environ à 1000 km d'ici. Comme le service est sans doute très dégradé par les catastrophes de Caracas, nous essayons de nous enquérir des possibilités offertes.
Tout à l'heure, j'étais mauvaise langue. Un service central de renseignements aux touristes existe ici. A la question que nous lui posons, il n'a pas de réponse. Mais il peut essayer de téléphoner pour nous à Puerto la Cruz où se trouvent les représentants de la seule compagnie reliant l'Est à Merida: "Los Expressos de Merida". Si nous pouvons lui prêter une carte téléphonique. Car il n'a pas de téléphone à sa disposition. Nous essayerons donc, mais le téléphone ne marche pas pour sortir de Cumana. La ligne a dû être coupée par un glissement de terrain.
Deuxième déconvenue, la seule compagnie qui peut nous parler de Mérida le fait à travers une hypothétique "correspondance" à Caracas et le seul bus pour Caracas part ce soir vers 19 heures. 
En synthèse, Cumana n'est pas vraiment le meilleur endroit pour partir vers Mérida et on nous conseille d'aller voir à Puerto la Cruz où passent plus de compagnies.
On s'entasse, façon sardines, dans un taxi plus ou moins officiel qui accepte de nous emmener à 6 (ce qui est strictement interdit) jusqu'à Puerto la Cruz  (environ 100 km) pour un prix raisonnable. Nous y arriverons une heure et demie plus tard vers 13 heures 30.
On se précipite vers l'antre des "Expressos de Mérida" qui vendent un non stop vers Mérida. Hélas, hélas. avec son meilleur sourire commercial, la potiche qui est là nous apprend que tout est complet jusqu'au  30 décembre et retourne se vernir les ongles. C'est sans doute la seule compagnie qui assure des réservations à plus de 48 heures, mais c'est la tuile..
Les têtes de nos "sacadoïstes" s'allongent. Le réveillon dans les Andes semble compromis.
Soudain, un "ethnique", rabatteur de son état et qui connaît l'état des bus en partance, se rue sur les "gringos" et essaie de leur vendre son produit...
Gérard : - Buscamos 6 puestos  para Mérida. (Nous cherchons 6 places pour Mérida)
Le rabatteur - No hay, pero puede ir à Caracas. (Il n'y en a pas, mais on peut aller Caracas.)
- No es bueno. (Ce n'est pas bon.)
- Si si. A Caracas, hay muchos bus para Mérida. (Si si, à Caracas il y a beaucoup de bus pour Mérida.)
- A que horas ? ( A quelle heure ?)
- Yo no se, pero hay.En el terminal de la Bandera.( Je ne sais pas, mais il y en a. Au terminal de la Bandera)
- Y este bus va para este terminal?(Et le bus que vous vendez va à ce terminal?)
- Si si.
Briefing du groupe et conclusion rapide: Il vaut mieux avancer que rester sur place ou reculer! Avançons donc. On suit notre homme.
Il nous amène au pas de course devant un bus antédiluvien qui est sur le point de partir, parlemente un instant avec le chauffeur et nous établit un billet. Le chauffeur descend et s'empare de nos bagages pour la soute, sous le véhicule.
Gérard, par sécurité et pour s'assurer qu'il a bien compris, s'adresse au chauffeur:
- Nous voulons aller à Mérida. Votre bus va bien au terminal de la Bandera, et c'est bien là qu'on trouve les bus pour Mérida ?
Quelques mots entre le chauffeur et le rabatteur et la réponse vient:
- Si si senhor.
- A quelle heure y serons nous?
- Vers les 20 heures, plus ou moins.
Il est 14 heures et nous voila reparti. Sans manger.
Nous sommes vraiment dans un bus "Standard". Pas de climat'. Ce qui ravit tout le monde. Mais moteur poussif, au point que tout ce qui roule sur la route nous double. Enfin presque. Il y a aussi ceux qui nous croisent.
Et puis il y a la Sono et la "musica Vénézolana".
Super. Mais en réfléchissant un peu, Gérard s'aperçoit que l'on a payé les billets au tarif "Ejecutivo". Soit à peu près 50% de plus que le "Standard". Les conversations du rabatteur avec le chauffeur devaient sans doute concerner le mode de partage de la surprime. Encore une occasion de négocier de perdue.
Vers 20 heures, le bus est arrêté au milieu d'autres, sur un parking, près d'une sorte de péage d'autoroute. Vue l'heure et l'environnement urbain dans lequel on roule depuis quelques temps, on ne doit plus être très loin de Caracas. Quelques personnes descendent se dégourdir les jambes. Dont Gérard, qui en profite pour s'assurer auprès du chauffeur (qui a changé entre temps) que « ce n'est pas là le terminal de la Bandera » . 
- No no
- Pero que es?
- Es una Estacion de ...
Gérard ne comprend pas ce que c'est, mais ce n'est pas ça.
A son retour dans le bus, le chauffeur interpelle Gérard:
- Mais, vous allez au Terminal de la Bandera ?
- Oui bien sûr
- Mais ce bus n'y va pas
- Ben où va t il alors ?
- Plus loin, à....
Là non plus, Gérard ne comprend pas où va ce bus, mais c'est sûr, ça n'est pas où on veut.
Et là: Eclats de voix plus sonores:
- Mais votre collègue m'a assuré, quand je suis monté, que nous allions là bas!
Ils hèlent ensemble ledit collègue. Penaud le collègue. Quoique, il a gagné 6 clients.
Mais attendez dit le chauffeur: Il faut que vous preniez le bus vert qui est là devant. Lui, va à la Bandera! Gérard sceptique craint qu'on ne se débarrasse de lui un peu trop facilement. Mais enfin, il n'a pas vraiment le choix: les sacs à dos sont déjà en train de transiter vers l'autre bus. 
Notre groupe se trouve ainsi aspiré, récupère ses sacs et s'installe dans le nouveau bus. 
Gérard enquête rapidement autour de lui: Ce bus va bien à la Bandera ?. Si  Si...
La réponse a l'air unanime. Alors, allons y. Mais on a eu chaud.
Si au moins on savait où on est et ce que c'est que ce terminal de la Bandera.
Donc, 1er principe: "Demander souvent à son voisin et au chauffeur: où on est et où on va."
A 21 heures, nous arrivons effectivement au terminal de la Bandera. C'est facile, c'est écrit dessus.
Devant la porte du terminal, on se fait héler: Para Mérida? Si si. Viene para aqui.
Et on nous entraîne à fond de train le long du terminal, sans entrer. Gérard, inquiet arrête tout le monde. C'est le seul moyen de causer à celui qui nous entraîne.
-Para Mérida, es un bus o no???  
Tu parles Charles.
-Un bus? No. Un taxi
Retour express vers l'entrée et le bureau d'information central du terminal. 
Les potiches manucurées qui s'y trouvent ont l'air de s'ennuyer ferme et tapent la discute.
Manifestement nous les dérangeons, mais elles consentent à nous informer que "Non, il n'y a plus de places nulle part pour Mérida. Nada antes del 31 deciembre.
Désarrois. On peut lire dans les 6 regards que 4 jours dans un terminal de bus, ça doit être dur dur. 
Mais nous sommes au Venezuela. Un rabatteur s'approche...
- Adonde va?
- A Mérida.
-OK Vienen conmigo
-Porque tiene un bus? Y hay 6 puestos?.
-Si si
-Es un bus, no un taxi? (Là on commence à devenir méfiants)
-Si si es un bus. Prisa, prisa.
Allons voir. Et on voit... En courant comme des dératés derrière notre homme, nous arrivons derrière la gare, sur la zone de chargement des bus. Plein de bus alignés. En partance.
Ca effervesce de tous les côtés. Ca brasse, ça crie. Ca veut remplir son bus à tous prix, avant de partir. S'il le faut avec une heure de retard.
Mais effectivement, nous voila devant un bus sur lequel est écrit Merida. Superbe, rutilant, sûrement climatisé "Ejecutivo". C'est trop beau, ils ont dû mal compter. D'ailleurs, on nous demande de patienter, le temps qu'ils recomptent. 6 places à trouver, ce n'est pas rien.
Mais si, le miracle s'accomplit. Il est 22 heures, nous sommes dans le bus, nos bagages aussi et nous sommes repartis. Et nous n'avons toujours pas mangé un vrai repas.
Nous sommes donc installés dans ce frigo à roues. Eh oui, plus c'est cher et plus c'est froid. C'est le luxe ici. (Imaginez le luxe en France: Quand dehors il fait si froid, on vous ferait voyager par 30 ou 35 °C dans le T.G.V. Tous en maillots de bain. Et sans éventail)
Et avec la télé aussi, et un film avec J.C. Vandamne. 
Si si, l'enfer existe Et il y fait froid.
Heureusement, il est prévu quelques arrêts pipi sur des aires de restauration. On peut donc grignoter quelques "Pasteles" locaux et acheter de quoi boire.
Et nous arriverons à Mérida le 28 décembre 1999 à 10 heures. Encore étonnés d'y être parvenus si vite, sans avoir rien programmé. A la vénézuélienne quoi.
Pour le retour des Llanos, nous compliquons encore le jeu. Nous ne partons pas de Mérida, où il y a un gros terminal et plein de lignes, mais d'une petite ville paumée qui n'a même pas de terminal.
C'est ainsi que le 7 janvier vers 8 heures 30, notre guide nous abandonne à l'arrêt de bus de Mantecal, d'où il nous soutient que nous pourrons gagner en une heure ou deux, San Fernando de Apure où nous trouverons plein de bus pour Puerto la Cruz. En fait, nous mettrons près de quatre heures pour arriver là. Et c'est bien normal, c'est à plus de 200 km.
Petit terminal de bus, et renseignements rapides: Il y a bien un bus pour Puerto la Cruz qui part à 19 heures. Peut être qu'il y a des places, mais le bureau correspondant est fermé.
En bavardant de droite et de gauche, on nous conseille d'avancer le plus possible vers le Nord, pour rejoindre la grande route Est-Ouest qui traverse le Venezuela au sud de la cordillère côtière. D'ailleurs, un bus part à l'instant dans cette direction.
Et le miracle s'opère encore une fois. 
En dépit du manque d'horaires, de leur non publication, des retards innombrables, à chaque arrêt on trouve un autre bus pour aller plus loin.
Et ainsi, en deux bus de plus, nous arrivons à Dos Caminos qui est un carrefour important de la route citée plus haut. Ce n'est pas un terminal, mais tous les bus qui relient Caracas à Puerto la Cruz passent ici. Certains même s'y arrêtent, car il y a là station service et aire de restauration. Il est 19 heures.
Nous décidons d'arrêter de courir une heure et e nous sustenter, et tout et tout. On commence à fatiguer des chips, arepas (beignets à la viande, au fromage, très gras. Ndlr) et Coca Cola toute la journée.
A 20 heures, repas pris, on sort du restaurant. Comment qu'on fait maintenant ?
Questions aux ethniques qui traînent par là.
- Si si, hay buses que viennen de Caracas para Pto la Cruz
-A que horas ???
- No se. Mas tarde. A las 11 horas. A las 4 de la manhana (à moins qu'ils ne veuillent dire dans 4 heures...)... Ben dis donc !...
Dans un premier temps, on pensait que les bus s'arrêtaient ici, mais on en voit passer devant nous "à fond les manettes". Un Vénézuélien nous montre comment faire: Il faut se placer au bord de la route, héler les bus qui passent pour qu'ils s'arrêtent et leur demander où il vont. 
Ben voyons, il suffisait d'y penser. 
D'ailleurs il le met en pratique pour nous deux ou trois fois. Deux ou trois fois où ça ne marche pas mais les chauffeurs s'arrêtent, répondent aimablement et repartent sans râler. 
Alors on s'y met. On prend son mal en patience, appuyé sur le tas de sacs à dos.
Vers 22 heures, un bus pointe son nez avec écrit dessus Puerto la Cruz. Nous l'arrêtons. Il a de la place et nous repartons. On arrive ainsi au terminal de Pto la Cruz vers 1 heure du matin.
Re-banc public, pour re-attendre un bus aléatoire. Pas longtemps en fait. Une demi heure plus tard, nous sommes repartis vers Cumana. Nous y arriverons à 2 heures 30. Pas mal comme moyenne. Bien mieux en tous cas que si nous avions tenté de planifier selon les horaires officiels. 

Les avions existent aussi et sont réputés pas très cher. Mais il faut encore que les aéroports fonctionnent. A cause des pluies, ce n'était pas le cas pour nous. Mais enfin, le Mérida/Cumana coûte 250 Francs en bus. En avion, ca pourrait coûter 420 francs, mais c'est toujours complet. On ne trouve de place que pour 630 francs. Et avec une mauvaise correspondance qui fait que ca dure quasiment la journée.